Les infections nosocomiales en France

On ne va pas à l’hôpital pour mourir et pourtant  chaque année,  selon  le ministère de la Santé, 4000 personnes décèdent encore des suites des « maladies nosocomiales »,  ces infections contractées dans l’enceinte des établissements de soins. Le chiffre atteindrait 12 000 morts selon d’autres sources si l’on considère qu’une infection nosocomiale accélère l’évolution mortelle d’une maladie grave.

En 2008, 700 000 personnes ont été atteintes d’une infection qu’elles n’avaient pas en entrant se faire soigner pour une toute autre pathologie. Les plus
exposées sont les personnes âgées ou immunodéprimées, les nouveau-nés, les polytraumatisés et les grands brûlés. Si certains patients meurent, d’autres survivent avec des séquelles dans des souffrances insupportables. Anonymes ou célèbres: ils vivent un véritable cauchemar. Comme Guillaume Depardieu en 1995: victime d’un accident de moto, il est opéré au genou et rien ne sera plus jamais comme avant. Au cours d’une des interventions, il contracte une redoutable bactérie: un staphylocoque doré qui le fera atrocement  souffrir. Ni les antibiotiques, ni la morphine ne réussiront à calmer ses douleurs. En 2003 il décide de se faire amputer de la jambe et de porter une prothèse. La médiatisation fera beaucoup pour accélérer la prise de conscience générale de ce fléau.
Autre exemple moins connu mais tout aussi poignant: celui d’un petit garçon, Tanguy (neveu de Charlotte de Turkheim). Né prématuré, il sera intubé au service de néonatalogie mais le matériel est défectueux. Un an plus tard, un orthopédiste remarque qu’il manque une tête de hanche à Tanguy.  Sa mère appelle le médiateur de l’AP-HP, qui dans une lettre reconnaît que cette infection nosocomiale est due à un mauvais entretien du matériel d’intubation. A l’époque, on compte encore en francs et l’AP-HP en propose 30 000 pour tout dédommagement.  le Lien (cf encadré)  déconseille à la famille d’accepter cette somme dérisoire. Une procédure en justice est entamée. Pendant ce temps, Tanguy souffre de ses nombreuses opérations à la jambe. Il faudra 10 ans pour que le jugement tombe et accorde 180 000 euros à la famille…Une somme insuffisante pour couvrir tous les frais encourus sur une aussi  longue période.

A la souffrance occasionnée par les infections nosocomiales ou par les maladies qui en sont les séquelles s’ajoute le calvaire des victimes dans leurs démarches pour faire reconnaître leur droit à une juste indemnisation. Heureusement, des associations  – notamment formées par des personnes ayant contracté des infections nosocomiales – les soutiennent et les aident dans leur combat. Combat inégal car il n’est jamais facile d’affronter un professionnel de santé qui a pour lui la connaissance qui vous fait défaut et vous fait rapidement sentir que vous ne savez pas de quoi vous parlez. On est d’autant plus démuni face à un praticien qui a accès aux services d’une organisation vouée à la défense de ses intérêts : l’Ordre des Médecins. Que dire lorsqu’un patient doit affronter un établissement hospitalier ?

Dans la plupart des cas, il faut attendre des années pour obtenir un avis favorable d’une commission d’experts, soit la reconnaissance de manquements de la part d’un médecin ou d’un hôpital. Et d’autres années seront nécessaires pour percevoir une indemnisation. Si le malade reste en vie ! Le plus souvent, c’est affaibli qu’il envoie des lettres qui restent sans réponses ou en fauteuil qu’il fait de vains déplacements.

De nombreux progrès ont été réalisés dans le combat contre ces maladies dans la dernière décennie. La prise de conscience, les protocoles d’hygiène, la mise en place de Comités de Lutte contre les Infections Nosocomiales (cf encadré) CLIN dans les hôpitaux sont autant de facteurs importants. Roselyne Bachelot, alors ministre de la Santé avait placé
son mandat sous le  signe de l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins. En 2009, elle lance le programme national de prévention des infections nosocomiales. Un plan sur  5 ans avec des objectifs chiffrés, des baromètres et une volonté de transparence.  Mais affirmer cela, c’est aussi dire qu’il y a un problème.  Et de là à éradiquer complètement ce type d’infection, il n’y a qu’un pas. Le risque zéro n’existe pas. La lutte contre ces maladies reste un combat de chaque instant.

Alexandra Durand

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