Entretien avec Malene Rydahl, auteure et conférencière

Cynthia Illouz, fondatrice du media THE WOMEN’S VOICES reçoit Malene Rydahl, auteure et conférencière, pour parler de bonheur et de bien-être.

Malene Rydahl est auteure et conférencière. Elle a écrit plusieurs ouvrages dont certains « best-sellers » « Heureux comme un Danois », « Les 5 illusions du bonheur », et le dernier, paru l’année dernière : « Je te réponds moi non plus ». Auparavant, elle avait fait une brillante carrière dans la communication auprès de grands groupes comme Bang & Olufsen, Le Bon Marché et les hôtels Hyatt.

Est-ce que, comme de nombreuses personnes, vous avez réorienté votre carrière car vous n’étiez pas tout à fait en phase avec vous-même ?

L’hôtellerie, c’était mon métier rêvé. J’ai dirigé des hôtels dans le monde entier.
En 2012, les Nations Unies ont sorti la fameuse liste « World Happiness Report », et mon pays d’origine, le Danemark, est sorti comme le pays le plus heureux au monde. À l’époque, je me demandais comment il était possible de mesurer la quantité de bonheur dans un pays. Après avoir lu le rapport, j’ai été étonnée, séduite, intriguée, par les explications sur la façon de construire une communauté de bien-être. Dans cette quête de compréhension, j’ai commencé par faire des recherches en-dehors de mon travail, et j’ai réalisé qu’il y avait une méconnaissance à ce sujet. Et surtout, ce que j’ai trouvé était fait par des académiques pour des académiques. Il manquait une explication un peu plus grand public sur le sujet du bien-être, et j’ai décidé d’écrire « Heureux comme un Danois ».
Ce livre a bousculé mon « travail de rêve », et comme cela arrive rarement dans nos vies, les planètes se sont alignées : j’ai trouvé tout de suite un éditeur, le livre a été largement exposé en France au départ, puis traduit dans de nombreuses langues.
J’ai été face à une prise de conscience où je voyais que mon rôle dans le monde était de porter cette parole sur le bien-être et la confiance en soi, la liberté, l’empathie, sur la collectivité. J’ai changé de vie par quête de sens, en ayant l’envie de participer à un projet collectif.

Vous accompagnez un certain nombre de ces entreprises sur le lien entre performance et bien-être, quel est ce lien ?

Sortie de mon travail « corporate », je me suis rendue compte que le bonheur était difficile à vendre dans l’entreprise, sauf en faisant le lien avec ses résultats. De nombreuses études montrent qu’un niveau de bien-être élevé dans une entreprise augmente la productivité, la performance, l’innovation : on retient les talents déjà présents et on en attire d’autres.
Il faut tout de même savoir ce que l’on entend par bien-être. Le terme « bonheur au travail » me met légèrement mal à l’aise, parce que très souvent il est traité par des artifices et des espaces ludiques : paniers de fruits, massage de pieds, baby-foot, machine à café… Aujourd’hui, on sait par des études que notre bonheur est lié à 50% à notre génétique, et à 40% à notre attitude face à la vie, face à l’autre, et aux actions que vous allez effectuer.

Il y a cette marge de manoeuvre qui dépend de nous. Les derniers 10% relèvent de circonstances extérieures, par exemple la pandémie de coronavirus, et donc de la réaction et de l’attitude que l’on va adopter face à ces circonstances extérieures.
Si on revient dans l’entreprise et que l’on met en place des bureaux magnifiques, des potagers incroyables sur des roof-tops, cela va avoir un petit effet mais qui ne sera pas durable. Les gens vont s’adapter à cette circonstance extérieure et vont finir par le prendre pour un acquis. Cet effet donne l’ordre des 10%, et va s’estomper : on appelle ça le phénomène de l’adaptation hédonique. Cette satisfaction va durer quelques jours voire quelques semaines, puis les salariés vont en vouloir plus. On finit par rentrer dans un système d’insatisfaction perpétuelle et ça n’en finit jamais. Cette stratégie de « faire plaisir » a donc beaucoup de limites dans l’impact sur les collaborateurs et surtout sur la durée. Je me focalise sur une autre étude sur le bien-être à l’échelle d’une vie entière, effectuée sur une durée de 75 ans, et portant sur 728 hommes.
La grande conclusion est que l’élément qui a le plus d’influence sur notre vie, est la qualité de nos relations. Cela nous rend plus heureux et en meilleure santé. A partir de cette conclusion extrêmement simple, je me focalise alors sur « comment construire des relations de qualité dans l’entreprise, pour augmenter les performances? »

L’acceptation, ce n’est pas « être d’accord avec », c’est accepter aussi la différence. Quand l’empathie est mise à ce service, cela crée de belles et bonnes relations de qualité.

La jeunesse se décrit aujourd’hui comme une génération sacrifiée, quel message d’espoir pouvez-vous leur faire passer sur leur bonheur à venir ?

J’ai envie de dire qu’il y a plein d’espoirs possibles. Je comprends une certaine forme de révolte, mais je n’ai pas été éduquée comme ça. Personne ne nous a « fait » ça, c’est arrivé à tout le monde, et donc j’ai énormément de compassion pour ce que tout le monde a payé comme frais émotionnels, et dans la jeunesse notamment. Mais maintenant que cela est arrivé, qu’est-ce qu’on fait individuellement et collectivement pour prendre le meilleur de cette situation, est sans se poser en victime de cette période ? J’inviterais à prendre un peu de recul et à revenir sur ma phrase d’avant : « ce matin, j’ai la chance de me réveiller en France ». La France est un pays formidable, où on a la chance de faire des études, un pass culture vient d’être donné à tous les jeunes… donc je trouve que le fait d’être jeune ici est une chance, et je donnerais aux jeunes les mêmes conseils que je donnerais à n’importe qui : gratitude d’abord, puis qualité de relation, empathie. Et surtout cette citation de Gandhi : « soyez le changement que vous voulez voir ». Quel monde voulez-vous ? Ne vous alignez pas sur le dénominateur, mais créez vous-mêmes les références pour dire « non, moi je veux que le monde soit comme ci ou comme ça », et adoptez ce comportement avant que le monde soit comme ci ou comme ça.
Je donne souvent l’exemple de la société danoise, car on a ce niveau élevé de bien-être. Il y a trois raisons à cela : le taux de confiance le plus élevé au monde (78% contre 22% en France) ; à l’école, le principal est de développer la personnalité de l’enfant, avec une valorisation de tous les talents, manuels comme intellectuels, et des cours d’empathie à partir de 6 ans ; enfin, il y a la responsabilisation individuelle dans un projet collectif qui ait un sens. Je reviens sur ce dernier point car 7 Danois sur 10 aiment payer des impôts : ils sont fiers de participer de manière individuelle à ce projet collectif de l’États providence. Ils ne sentent ni victimes ni juges de ce projet (je ne paye pas mes impôts car les mesures ou les politiques sont « nuls » …), mais individuellement responsables. Les rôles de victimes et de juges sont souvent très passifs : il y a des déclarations, mais pas de participation à ce que l’on construit.
Au Danemark on nous donne très tôt une responsabilité individuelle, ce qui fait qu’on se sent faire partie du problème constaté, et de la solution.
Je sais que tout le monde a laissé des plumes pendant cette période, mais je crois, grâce à cette gratitude que j’aime cultiver, qu’on quand même de la chance de vivre ici.

Retrouvez l’intégralité de l’entretien sur le site The Women’s Voices en podcast sur les plateformes, n’hésitez pas à vous abonner et à nous laisser des étoiles !

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